A quoi devra ressembler le commerce luxembourgeois à l’horizon 2020 ? La clc (confédération luxembourgeoise du commerce) a souhaité apporter une réponse à cette question en analysant plusieurs tendances et évolutions qui affectent les modes de consommation et, donc, la manière de développer son affaire.

Commerce-Thierry Nothum

M. Nothum, la clc a présenté, il y a un peu plus d’un an, un petit ouvrage intitulé Le commerce luxembourgeois à l’horizon 2020. Qu’est-ce qui a motivé cette initiative ?

Le Luxembourg connaît une croissance démographique qui permet au commerce, de manière générale, de croître. Cependant, si on considère l’évolution du chiffre d’affaires dans le commerce de détail en neutralisant la variable démographique, on constate que le chiffre d’affaires généré, depuis 2007, connaît un recul significatif. Dans les faits, les dépenses des ménages dans le commerce de détail ont commencé à chuter à partir de 2007, bien avant le déclenchement de la crise financière. Cette dernière n’a fait qu’accentuer un phénomène structurel que plusieurs facteurs peuvent expliquer. On pense notamment à un climat de surconsommation, avec des consommateurs saturés matériellement et psychologiquement, qui n’ont plus besoin de consommer pour se sentir bien. Mais aussi à des crises successives, sociales, sanitaires, environnementales, économiques… qui provoquent un sentiment d’insécurité et d’instabilité psychologique, conscient ou non, dans le chef des consommateurs. A tel point que de nouveaux schémas de consommation ont vu le jour. On constate que les changements opérés dans le comportement du consommateur sont la conséquence de facteurs structurels dont il faut aujourd’hui tenir compte pour imaginer le commerce de demain.

L’enjeu, au terme de cet exercice prospectif que vous avez mené, est donc de trouver les clés pour repositionner le commerce ?

Oui. Il faut pouvoir tenir comptes des enjeux, des défis et des évolutions probables qui auront un impact sur le commerce. Aujourd’hui, en fonction de nombreux éléments que nous avons identifiés et analysés, nous pouvons anticiper certains changements, établir des scénarios probables. Nous avons tenté de déterminer ce qu’il fallait faire pour ne pas avoir à subir ces changements et profiter des opportunités qu’ils pourraient cacher.

Quelles sont les principales tendances qui risquent d’affecter le commerce dans les années à venir ?

D’abord, on constate une tendance à l’individualisation. Aujourd’hui, le consommateur est de plus en plus autonome et émancipé. Il est critique, exigeant, infidèle et à la recherche de solutions sur mesure. L’autre tendance forte réside dans le fait que chacun est de plus en plus connecté. Le consommateur, aujourd’hui, est mieux informé. Il échange et partage volontiers et facilement des informations. Le consommateur est aussi mobile. Il se déplace facilement, tant sur les marchés traditionnels que sur les marchés digitaux. Enfin, il est à la recherche de plus de bien-être, soucieux pour sa santé et pour sa sécurité.

De quelle manière ces tendances ont-elles une influence sur le commerce ?

L’individualisation inscrite au cœur de la société, mise en lien avec les aspirations de chacun à plus de bien-être et de santé, conduit, par exemple, à un retour aux produits locaux ou issus du terroir. La mobilité grandissante, elle, amène à une autre organisation de la vie. Le facteur temps est devenu une denrée précieuse. Aujourd’hui, on veut trouver facilement ce que l’on cherche, sans perdre de temps. Les gens, par exemple, ne souhaitent plus forcément faire leurs achats dans des hypermarchés, mais veulent trouver ce dont ils ont besoin au quotidien sur le chemin du travail, dans leur station-service. Le consommateur veut du « sur mesure ». La consommation de demain devrait être de plus en plus basée sur des valeurs, de l’émotionnel. La dimension « service » aura sans doute de plus en plus d’importance à l’avenir.

Quels sont les défis pour le commerce au Luxembourg ?

Un des défis, pour le commerce au Luxembourg, sera celui de la restauration de la confiance. Cela passe, notamment, par le développement d’un commerce axé sur le service, et donc par un autre management des ressources humaines et par la formation. L’offre, de plus, doit être calquée sur les nouveaux besoins. Enfin, il faut inciter les commerçants à développer une stratégie e-commerce afin d’être visibles sur les divers canaux et répondre aux attentes des consommateurs où qu’ils soient.

 Propos recueillis par Sébastien Lambotte