Pour fidéliser ses collaborateurs ou se positionner de façon compétitive en matière de recrutement, certains employeurs accordent une pension complémentaire (en cas de retraite, d’invalidité ou de survie) à leurs salariés ou catégories de salariés en plus de celles prévues par le système légal de sécurité sociale.

En ce qui concerne le volet épargne pour la retraite, deux types de plans de pension s’offrent à ces employeurs :
  • plan à contributions définies : dans le cas d’un plan à contributions définies,  il n’y a pas de passif social (1), dans la mesure où il n’y a pas d’impayés sur les cotisations que l’entreprise doit verser au titre du plan de pension ;
  • plan à prestations définies : dans le cas d’un régime à prestations définies, le passif social représente l’engagement de l’entreprise envers ses salariés à leur verser une retraite prédéterminée lors de leur affiliation au plan de pension. Ce passif constituera une charge à plus ou moins long terme, dépendant de l’âge du salarié lors de l’évaluation et de l’âge attendu de départ à la retraite défini par l’employeur. La somme des capitaux constitutifs nécessaires au paiement de la retraite définie au plan à chacun des salariés potentiellement bénéficiaires, sous réserve qu’ils soient présents dans l’entreprise au moment de leur départ en retraite constitue le montant de l’engagement de l’entreprise. Ces capitaux constitutifs sont déterminés en fonction de la probabilité pour l’entreprise de devoir verser effectivement ces sommes, et d’un taux d’actualisation.






On peut alors définir la formule suivante :V = DA x P x iV : engagement de l’entreprise, soit la provision à enregistrer au passif du bilan.

-         DA : droits acquis par les salariés concernés (le plus souvent exprimés en pourcentage du salaire acquis par année d’ancienneté) ;

-         i : facteur d’actualisation permettant de prendre en compte le décalage de la valeur temps existant entre la date présumée de versement des prestations (la date de départ à la retraite définie par l’employeur) et la date d’évaluation de l’engagement (la date de clôture de l’exercice, le plus souvent le 31 décembre) ;

-         P : probabilité pour l’entreprise d’avoir à verser ces droits.

On calcule cette dernière avec cette formule :

P = pa x (1-T) x pr

-         pa : survie des affiliés avant l’âge de la retraite ;

-         pr : bénéficiaires potentiels après l’âge de la retraite ;

Ces probabilités sont calculées en fonction de tables de mortalité.

-         T : probabilité de leur départ de l’entreprise avant la retraite. T est une hypothèse démographique fournie par l’entreprise sur le taux de démission de son personnel. Cette hypothèse doit correspondre le plus possible à la réalité de l’entreprise, par catégorie et par âge.

 

Dans le contexte économique actuel, la question de l’hypothèse de rotation du personnel dans l’évaluation de l’engagement pour retraite peut se poser. A l’épreuve de la crise financière, les employeurs en difficulté ont recours principalement au licenciement collectif (avec des durées de validité allant jusqu’à 3 ans) plutôt qu’à l’utilisation de la rotation naturelle et autres accords tels que les possibilités de préretraites.

Retenir les licenciements collectifs économiques dans le coût probable futur supporté par l’employeur envers ses salariés au titre de leur retraite induirait des licenciements systématiques dans les prévisions actuarielles. Par ailleurs, les indemnités de cessation d’emploi (cessation d’emploi du salarié avant l’âge normal de départ à la retraite à l’initiative de l’employeur ou acceptation du salarié de l’offre d’indemnités en échange de la cessation de son emploi) font l’objet d’un traitement spécifique selon la norme IAS 19 (2).

Le taux de rotation devrait donc correspondre uniquement au taux de démissions des salariés, les emplois supprimés par l’employeur à travers l’accord d’un plan social rentrant dans les indemnités de cessation d’emploi. Toutefois, ce taux de rotation défini ainsi inclut les démissions des salariés qui, menacés d’un probable licenciement économique, retrouvent un nouvel emploi pendant la durée de validité du plan social (rappelons que les cotisations pour pension de retraite cessent pendant les périodes de chômage des salariés licenciés). Il est donc recommandé d’apprécier le taux de rotation naturelle afin que celui-ci ne soit pas faussé par la négociation de plans sociaux annoncés dans le passé.

L’entreprise doit ainsi assurer le maintien des droits acquis de ses futurs bénéficiaires compte tenu de ce taux de rotation. Le maintien des droits acquis dans l’entreprise cessera lorsque le salarié quittera l’entreprise avant l’âge de la retraite après avoir été affilié à un régime complémentaire et, dans le cas d’un transfert, de sa mise à la retraite ou d’un rachat (qu’il soit démissionnaire, licencié ou signataire d’une résiliation d’un commun accord avec son employeur).

 

Marc Voncken
Associé, Solvency II Leader

Corentine Hamy
Manager

PwC Luxembourg

 

 

(1) Ensemble des engagements pris par l’entreprise, c.-à-d. pension, complément de retraite, indemnités de licenciements, etc.

(2) IAS 19 s'applique à la comptabilisation de tous les avantages du personnel, sauf ceux auxquels s'applique IFRS 2 « Paiement fondé sur des actions ».