Une charte pour l’égalité
femmes-hommes dans le sport
Même si le Comité International Olympique (CIO) s’est engagé à « encourager et soutenir la promotion des femmes dans le sport, à tous les niveaux et dans toutes les structures, dans le but de mettre en oeuvre le principe d’égalité entre hommes et femmes » (Charte olympique, chapitre 1, règle 2.8), on constate que les sportives n’occupent toujours pas la même place que les hommes dans le sport et qu’elles sont encore victimes de préjugés. Initié par la Ville d’Esch-sur-Alzette et ADT-Center, le projet Tou.te.s ensemble vers l’égalité femmes-hommes dans le sport a pour but de promouvoir l’égalité dans le sport, mais aussi de soutenir le sport féminin. Rencontre avec les 3 initiatrices du projet, Norma Zambon, cheffe du service des Sports à la Ville d’Esch, Nicole Jemming, cheffe du service Egalité des chances à la Ville d’Esch, et Joëlle Letsch, Managing Partner d’ADT-Center.
En vue de la tenue de votre colloque de juin dernier, vous avez préalablement réalisé une enquête, menée par la sociologue Enrica Pianaro. Qu’a-t-elle révélé ?
Au Luxembourg, les conseils d’administration des fédérations sportives ne sont composés que de 21 % de femmes. Seu- lement 9 % sont dirigées par une femme. Ces chiffres sont similaires dans toute l’Union européenne. On constate également que la pratique du sport des femmes diffère de celles des hommes et qu’un décrochage sportif s’opère pour les filles entre 12 et 18 ans, aux âges où les jeunes filles se posent plus de questions que les garçons sur leur corps, sur l’image qu’elles renvoient sur les terrains ou dans les salles de sport et par rapport aux médias. Pour les femmes adultes, le fait d’être mère et de se soumettre aux tâches familiales est aussi un frein à pratiquer du sport. Ici encore, l’écart est important, seules 20 % de femmes font une activité physique.
Lorsqu’on accède au sport de haut niveau, les budgets alloués aux sportives sont-ils similaires à ceux des hommes ?
Non, même pour le haut niveau, ils restent en dessous de ceux alloués aux sportifs masculins. Il en va de même concernant les salaires et les prix remis aux femmes. Dans les médias, on note également une grande disparité, les résultats du sport féminin passant souvent en second plan. Ceci engendre un manque évident de modèles féminins. Dans les services sportifs des médias eux-mêmes, on note aussi que les femmes journalistes ou commen- tatrices sportives sont peu nombreuses, ce qui explique une sous-médiatisation du sport féminin.
Quelles sont les solutions ?
Comme nous l’avons évoqué avant, beaucoup de freins jalonnent les par- cours des sportives, notamment en raison de stéréotypes de genre. Pour quelles raisons une fille ne pourrait-elle pas faire de la boxe et un garçon de la danse ? Les préjugés sexistes déterminant qu’un garçon doit être viril et une fille plutôt dans la séduction ne jouent pas en faveur de l’égalité. Il faut donc continuer à sensibiliser et à former les acteurs et actrices du monde sportif et les médias à l’égalité du genre. Les communes et les instances publiques ont ici un rôle important à jouer dans la promotion de l’égalité dans le sport, en mettant par exemple à disposition des ressources nécessaires (pour les équipements féminins, par exemple), en ciblant leur soutien financier aux clubs qui font avancer l’égalité...
C’est ainsi qu’est née votre idée de charte ?
En effet, nous travaillons à l’élaboration d’une charte Égalité femmes-hommes dans le sport, qui sera présentée par la Ville d’Esch-sur-Alzette en mars 2023. Cette charte, réalisée en co-construction par les acteurs.rices du monde sportif, constitue une démarche innovante pour le Luxembourg et nous espérons qu’elle servira de fondement à de nombreux clubs et fédérations du pays. En s’engageant pour une culture d’égalité dans le sport, en favorisant la visibilité des femmes dans la pratique sportive, en s’appuyant sur tous les talents, femmes et hommes, pour avancer..., n’est-ce pas contribuer à siffler le hors-jeu des inégalités hommes-femmes dans le sport ?
Propos recueillis par Isabelle Couset