Outplacement : état des lieux au Luxembourg
Dans le cadre de licenciements, les salariés peuvent demander à leur employeur un accompagnement en outplacement dans leur package de départ. Comment la transition de carrière est-elle abordée par les entreprises au Luxembourg et quelles sont les attentes des employeurs vis-à-vis d’un programme d’outplacement ? Tel est le sujet de notre sondage dont nous vous présentons les principaux résultats.
Avant de répondre à ces questions, rap- pelons en quoi consiste l’outplacement. L’outplacement peut être défini comme un processus d’accompagnement de mobilité professionnelle externe d’un salarié licencié ou ayant négocié son départ. L’outplacement peut être individuel ou collectif et a pour objectif d’apporter toute l’aide nécessaire aux personnes licenciées afin de faciliter un retour plus rapide à l’emploi. L’atout majeur de cet accompagnement tient au fait que le salarié n’est pas seul face à lui-même, dans cette nouvelle situation remplie de peurs et de doutes.
Subi ou choisi, l’outplacement est un accompagnement professionnel per- sonnalisé et bienveillant qui permet aux personnes en transition de carrière de se reconstruire pour mieux rebondir vers un nouveau projet professionnel. Il ouvre la voie à une reconnexion à soi, ses valeurs et envies, éventuellement à d’autres hori- zons, d’autres métiers, et pourquoi pas à l’entrepreneuriat.
Dans une vue d’ensemble, l’outplacement permet d’effacer un tant soit peu la face négative d’un licenciement. L’employeur devient plus social envers un salarié inquiet pour le futur de sa carrière professionnelle. Ce qui est quand même assez rassurant. Le départ de l’entreprise se réalise donc dans des conditions socialement respon- sables, permettant ainsi aux différentes parties de se quitter dans des conditions les plus optimales.
Afin de connaître la vision des entreprises et des responsables RH sur l’outplacement, nous avons mené une étude lors du dernier trimestre 2019. La démarche consiste à mieux cerner les attentes des entreprises dans l’utilisation de ce dispositif d’accompagnement.
Résultats de l’enquête
Notre étude a pu réunir 23 entreprises représentant 6 secteurs d’activité au Luxembourg (Finance, Assurance, Ser- vices, Industrie, Santé, Social), soit environ 21.500 salariés. Globalement, toutes les entreprises connaissent l’outplacement et en quoi il consiste.
La majorité des entreprises de notre échantillon a déjà eu recours à l’outplacement, soit 70 %, que ce soit pour un accompagnement individuel ou collectif. 44 % des entreprises reconnaissent déjà avoir utilisé l’outplacement mais de manière exceptionnelle, tandis que 26 % offrent un accompagnement à la sortie, principalement pour des profils seniors, soit une entreprise sur quatre.
Parmi les entreprises qui ne proposent pas d’outplacement, soit 30 % des entre- prises interrogées, se trouvent deux banques et les sociétés actives dans le secteur de la santé et du secteur social. Dans ces secteurs, cela s’explique par une pénurie de main-d’œuvre et un faible taux de licenciements. Concernant les banques qui ne proposent pas d’out- placement, elles ont pris le parti d’offrir une enveloppe d’indemnités de départ. Il n’y a pas de communication particulière sur des possibilités d’accompagnement en outplacement envers les personnes licenciées, que ce soit pour des licenciements individuels ou licenciements collectifs. À noter que les PME ne sont pas représentées dans l’échantillon des entreprises interrogées, et que ce taux serait certainement bien plus important.
Aujourd’hui, les entreprises ont de plus en plus le réflexe de recourir à l’outplacement collectif lors de restructurations importantes. Toutefois, elles ne proposent une démarche d’outplacement individuel aux salariés sortants qu’à dose homéopathique, et majoritairement à des cadres.
Nous regrettons de ne pas avoir pu échanger avec les partenaires sociaux sur le sujet. Par contre, il nous semble important de mentionner que des entreprises ont témoigné du fait que les syndicats ne sont pas toujours en faveur de l’outplacement lors de la négociation d’accords dans le cadre de licenciements collectifs. La priorité va souvent à une enveloppe d’indemnisation qui peut être utilisée pour de la formation et non un accompagnement personnalisé pour pouvoir rebondir vers un nouveau projet professionnel. Le constat est que les personnes licenciées se sentent obligées d’utiliser leur budget pour des formations qui ne sont pas toujours en lien avec leur futur projet professionnel. Un exemple nous a été rapporté que des salariés ont utilisé leur indemnité de départ pour des formations linguistiques à l’étranger, y com- pris pour des membres de leur famille. Ils auraient pourtant apprécié avoir de l’aide pour gérer l’après licenciement qui a été difficile, surtout dans la gestion émotionnelle du deuil de leur emploi. La plupart des salariés ne connaissent pas l’outplacement et en quoi il consiste. Certains se renseignent pour avoir de l’aide mais c’est une minorité.
Quels sont les attentes et critères d’évaluation d’un programme d’outplacement du point de vue de l’entreprise ?
Le profil du consultant en outplacement arrive en première position des attentes des Ressources humaines. Il doit posséder des qualités humaines et faire preuve d’empathie et de bienveillance. Il possède une vaste expérience du secteur de l’entre- prise et connaît bien le marché concerné. Un accompagnement sur mesure est un autre critère important afin de répondre aux attentes du salarié, chaque cas étant particulier. C’est clairement un facteur clé du succès de l’outplacement.
Si le consultant en outplacement est également coach, cela apporte une dimension qualitative à l’accompagnement. Les techniques de coaching permettent de mener des réflexions en profondeur et d’améliorer la confiance en soi qui est souvent déficitaire après un licenciement. Vient ensuite la palette des outils de développement personnel qui seront utilisés par le coach. L’utilisation d’outils digitaux est de plus en plus appréciée mais sans remplacer le dialogue en face- à-face. La déontologie est un autre facteur qui regroupe la confidentialité et la discrétion de l’accompagnement, ainsi que le respect de l'humain. Le tarif n’est pas le facteur déterminant comme l’indique ce sondage. Enfin, l’entreprise apprécie recevoir un reporting en fin d’outplacement.
Les clés du succès de l’outplacement :
- Le profil et la seniorité du coach
- La connaissance du secteur de l’entreprise et du marché
- Un accompagnement sur mesure
L’objet de notre étude porte également sur la question de savoir quels sont les bénéfices de l’utilisation du coaching en outplacement. Les réponses sont globalement positives. La majorité des DRH (82 %), considèrent que si le consultant en outplacement est également coach, cela apporte une plus-value à l’accompagnement. Le coach est formé pour prendre en compte la globalité de l’individu,sa personnalité, son mode de fonctionnement, ses forces et ses faiblesses, ses blocages éventuels ou freins au changement, ses peurs, afin de l’aider à devenir acteur de sa vie en cohérence avec ses valeurs. Les techniques de coaching permettent d’aider la personne à reprendre confiance en elle, à gérer ses émotions, à trouver ses propres réponses pour pouvoir prendre sa vie en main et construire ainsi son futur projet professionnel. Certains ont mentionné qu’un coach professionnel apporte une crédibilité et un sérieux à l’accompagnement, et contribue à préserver l’image employeur, étant donné que le coaching s’inscrit dans un cadre déontologique.
Les 18 % restants des responsables RH interrogés considèrent que le coaching n’est pas indispensable car tout dépend du profil du consultant, de son parcours, de sa personnalité. Mais tous sont d’accord sur le fait que le consultant idéal est une personne senior avec une vaste expérience en entreprise afin de pouvoir comprendre la réalité de celleci et ses enjeux. Une expérience dans le secteur de la personne licenciée est un plus et crée davantage de lien. Le consultant doit avoir de l’empathie et la capacité à accompagner les personnes dans la gestion du changement.
Alors que l’outplacement est devenu une obligation légale en France et en Belgique (sous certaines conditions) et fait ainsi partie d’une démarche RSE, l’outplacement au Luxembourg dépend beaucoup du secteur d’activité de l’entreprise et du type de licenciement. Les DRH sont pourtant d’accord pour reconnaître les bénéfices de cet accompagnement en transition de carrière des salariés.
Conclusion
Le moment de la transition professionnelle n’est pas un cap aisé à passer, surtout lorsque celle-ci est imposée suite à un licenciement. C’est souvent une étape décisive au niveau émotionnel, personnel, relationnel et identitaire.
Cette étude indique que l’outplacement n’est pas utilisé dans les secteurs où il y a une pénurie de main-d’oeuvre qualifiée et un faible taux de départs, tels que les domaines de la santé et du social. Elle nous éclaire également sur les attentes des entreprises. Aujourd’hui, les entreprises ont de plus en plus le réflexe de recourir à l’outplacement collectif lors de restructurations importantes. Toutefois, elles ne proposent une démarche d’outplacement individuel aux salariés sortants qu’à dose homéopathique, et majoritairement à des cadres.
Même si plusieurs conventions collectives conseillent un outplacement en cas de licenciement, l’entreprise reste libre d’offrir cet accompagnement aux salariés licenciés. Même si le salarié fait la demande d’un outplacement, l’employeur n’a aucune obligation de l’accepter. Les négociations aboutissent généralement à un accord sur une enveloppe de départ, mais sans outplacement. Encore trop peu d’entreprises proposent un package de sortie qui comprend un outplacement.
Alors que l’outplacement est devenu une obligation légale en France et en Belgique (sous certaines conditions) et fait ainsi partie d’une démarche RSE, l’outplacement au Luxembourg dépend beaucoup du secteur d’activité de l’entreprise et du type de licenciement. Les DRH sont pourtant d’accord pour reconnaître les bénéfices de cet accompagnement en transition de carrière des salariés. D’ailleurs, la moyenne de satisfaction des entreprises concernant les services d’outplacement est de 80 % selon l’enquête.
Pour conclure, l’outplacement est une bonne formule pour favoriser des séparations douces entre employeurs et salariés. Il permet aux salariés de quitter l’entreprise en bénéficiant d’un coaching personnalisé pour optimiser les chances de retrouver un nouvel emploi. Quant à l’employeur, cette option lui permet de faire preuve de responsabilité sociale envers ses salariés. Malgré ces avantages pour les deux parties, un travail de sensibilisation reste à faire au sein des entreprises et particulièrement auprès des partenaires sociaux.